Intérêt remarqué pour la dédicace du roman Cœur du Sahel de Djaïli Amadou Amal à l’instituts français des villes de Yaoundé et Douala.
Il y avait du monde dans les salles de l’Institut Français du Cameroun. D’abord dans la capitale politique, puis dans la capitale économique à l’occasion de la dédicace de son roman Cœur du Sahel. C’est dans une belle ambiance chargée de beaucoup d’humour, lors de cette conversation modérée par la journaliste Clarence Yongo que l’écrivaine camerounaise en présentant cette œuvre littéraire l’a fait découvrir au public.
Cœur du Sahel: plus qu’un roman
Les précédentes œuvres de l’écrivaine camerounaise, prix Goncourt des lycéens 2020 en France, sont centrées sur l’intimité de la femme du grand-nord Cameroun, les problèmes qu’elle endure dans son foyer et qui ne sortent pas de la case. Une intimité souvent désignée dans cette partie du pays par le mot «Sahré». Djaïli a élargi son objet au reste de la société du septentrion avec Cœur du Sahel.
Le roman dépeint la réalité sociale de la région marquée les attaques de Boko Haram, la crise alimentaire, la condition sociale de la jeune fille cause qui tient l’autrice à cœur, la question du vivre ensemble est également évoquée dans une région où vivent plusieurs tribus et diverses religions (animistes, musulmans et chrétiens). C’est en raison de l’aspect engagé de ce roman que l’icône de la littérature s’est battue pour qu’il soit à un prix abordable dans notre contexte.
«Je fais de la littérature engagée et j’écris d’abord pour le Cameroun. Il est donc hors de question que mon livre soit un luxe pour les Camerounais»,
déclare-t-elle. Aussi, il y a deux versions, du roman, dont une version au prix local, celui de 5 000 Fcfa.
La femme du Sahel, guérie grâce à la lecture et l’écriture
Mariée précocement et de force à l’âge de 17 ans, la tendre jeunesse de Djaïli a été une période traumatisante. C’est dans la lecture des œuvres littéraires que la jeune femme trouve du réconfort. Mais dans son environnement, lire un livre est un luxe, «j’ai dû escalader les murs de l’église catholique parce que c’est là-bas que je pouvais trouver des livres», se souvient l’autrice. Lorsqu’elle commence à écrire, le but n’est pas de vendre sa plume, mais juste se libérer en se confiant, par ses écrits. Le déclic est lancé quand elle a ses filles. Le refus radical que ces dernières subissent la même chose qu’elle, l’a amenée à se lancer dans la littérature engagée et publier ses œuvres. «Je ne voulais pas qu’à l’âge de 13 ans mes filles soient mariées… », révèle-t-elle.
Le bon écrivain et le goût à la lecture
Les questions n’ont pas manqué pour la docteure Honoris causa de l’université de sorbonne. Des jeunes voulant découvrir le secret pour écrire aussi bien qu’elle et gagner le Goncourt, des parents cherchant à savoir comment on peut amener les enfants à aimer la lecture. Aux premiers, l’écrivaine a fait comprendre que l’écriture est une passion que l’on tire de son vécu ou de sa société un peu comme elle. C’est en écrivant avec passion que l’on attire des lecteurs et donc dans une certaine mesure, que l’on gagne des prix. Mais en littérature on ne triche pas. Pour reprendre ses mots : «si vous écrivez pour gagner des prix, personne ne va vous lire, parce que vous n’écrivez pas avec votre cœur ». Quant aux stratégies du goût à la lecture, l’étoile du Sahel n’a donné qu’une seule réponse : que les parents lisent eux-mêmes devant leurs enfants et ces derniers suivront naturellement.
«Les enfants n’inventent rien, ils imitent simplement ce que font leurs parents. Si vous lisez même si c’est trois minutes par jour, ils liront, si vous fréquentez les bibliothèques, ils feront autant»,
a-t-elle expliqué. Un conseil très bien reçu par l’auditoire.
Chanelle NDENGBE