Ces femmes et leurs enfants font partie des 20000 personnes déguerpies et leurs maisons détruites par des engins au quartier Essengue à Douala.
Un champ de ruine. C’est le nouveau visage que présente le quartier Essengue une zone périphérique de la ville, située dans le premier arrondissement de Douala.
Les habitations ont vécu la fureur des gros engins. Tout est broyé, seules les casses de parpaings, les planches et d’autres débris de terre laissent voir qu’il y a quelques jours cet espace abritait des immeubles tout comme de petites habitations.
Toutes les familles qui y résidaient sont dans la rue.
«ça fait trois jours que je dors sur la route avec mes enfants. Le soir on étale le matelas on se couche avec les enfants. On fait le feu de bois pour diminuer les moustiques»,
lance dame Maimouna l’air embarrassé.
Nous rencontrons la jeune femme désemparée, courbée devant un enclos qui leur sert désormais de dortoir. Elle lave les vêtements de ses enfants. Maimouna ne manque pas de verser quelques gouttes de larmes lorsqu’elle lève la tête à notre arrivée. Ses enfants allongés sur des planches, ont la mine fatiguée. La jeune dame originaire de l’Ouest Cameroun, précisément de Foumbot est complètement perdue et se demande ce que lui réservent les prochains jours. Elle a encore passé la nuit sous la pluie avec ses enfants.
«Je veux rentrer au village, mais je n’ai pas d’argent. Les enfants ne mangent pas depuis trois jours, où est ce que je vais partir on va certainement mourir ici. L’école est finie comme ça pour les enfants»,
déplore-t-elle.
Elles sont nombreuses dans cette situation, encore plus compliquée avec des femmes mères célibataires. Lucie est l’une d’elle. Originaire du centre, précisément de Bafia, elle résidait à Essengue depuis plus d’une quinzaine d’années. Avertie pour le déguerpissement, elle gardait tout de même espoir. Elle s’est donc retrouvée face à la réalité, lorsque les gros engins les ont presque trouvés au lit.
«C’était la rage seulement. Je travaillais au restaurant, depuis trois jours j’ai arrêté le travail. Je marche partout pour chercher la maison à louer je ne trouve pas. On prépare sur le feu de bois au moins pour que les enfants ne passent pas la journée affamés»
soutient Lucie. Elle est assise adossée sur ses valises et devant elle, une marmite non couverte posée sur un foyer en bois.
Parler de la destruction de ces maisons c’est aussi faire allusion à l’animateur Tony Nobody qui a tiré la sonnette d’alarme sur la situation des habitants de ce quartier il y a plusiuers mois.
«Voici donc où ma tante Ngo Ngué Chantal dont le défunt mari a acheté un lopin de terre et où ils ont investi pendant 25 ans .Voici donc le reste , la portion congrue du théâtre ignoble et funeste des gens qui se sont opposés parfois violement d’avec les autorités et les sbires du port autonome de Douala qui aujourd’hui a eu la force de les chasser des terres qu’il prétend avoir de droit. Qui a raison ? Qui a tort ? Il serait sorcier de le savoir mais seulement pour ma part, 22 mille âmes sont en peine et des plus petits qui n’ont pas demandé d’être dans cette situation»,
L’expulsion des habitants du quartier Essengue a fait l’objet d’une procédure entre le Port autonome de Douala et le collectif de défense des intérêts des populations d’Essengue. Des réunions ont ainsi été organisées, des campagnes de sensibilisation et d’explication de la démarche, des évaluations de biens, suivies par une indemnisation des personnes impactées, disent les responsables du port autonome.
Nombreuses d’entre ces personnes déguerpies exigent pourtant d’être indemnisées car, elles disent n’avoir rien reçu.
La situation de ces familles est pitoyable, elles poussent des cris de détresse et implorent les âmes de bonne volonté de leur venir en aide.
Rachèle KANOU