www.griote.tv

FEMMES CONDAMNÉES À LA PEINE DE MORT : UNE RÉALITÉ INVISIBLE

Le thème de la 19ème édition de la journée mondiale contre la peine de mort porte sur la femme et la condamnation à mort.

«Femmes condamnées à mort : une réalité invisible», pour soulever la cruauté que vivent les femmes dans le couloir de la mort.

Le Cameroun fait encore partie des 24 pays de l’Afrique qui pratiquent la peine de mort, même si les exécutions ne sont pas toujours effectives. Des femmes condamnées à la peine de mort et qui vivent incarcerées avec leur progéniture; c’est une réalité que connaissent certaines camerounaises.  A la prison de Maroua par exemple, une femme vit dans les couloirs de la mort depuis plusieurs années. Elle est la seule qui reste dans cette condition.

«En ce moment au Cameroun, il y a une femme qui souffre dans les couloirs de la mort à la prison de Maroua. Elles étaient au nombre de 9, nous avons pu libérer 8 et celle qui y reste, c’est juste parce que le magistrat qui a rendu sa décision est allé à la retraite »,

déplore Me Nestor Toko, avocat au barreau du Cameroun.

Coordonnateur du projet, l’avocat et ses confrères abolitionistes mènent une lutte acharnée contre la peine de mort. Il fait savoir que ce n’est qu’en 2020 que la plupart de ces femmes ont bénéficié de la grâce présidentielle.  Ainsi leur peine a été commuée, passant de la peine de mort à la peine à vie. De leurs propres moyens ils sont parvenus à libérer 8 des 9 femmes qui vivaient dans ces conditions à la prison de Maroua. Parmi elles des adolescentes âgées de 17 ans qui avaient été condamnées pour des faits de terrorisme.

www.griote.tv

Les femmes vivent des conditions désastreuses dans les prisons

Malgré la remise de peine, ces femmes vivent encore dans des conditions difficiles du milieu carcéral et ce sera pour le restant de leur vie. Elles ne bénéficient pas de soins médicaux appropriés et même d’aucune attention particulière, compte tenu de leur spécificité féminine. Selon le mouvement abolitioniste, Certaines subissent cette peine injustement, car elles auraient pu bénéficier des clauses d’irresponsabilité.

«Lorsque tu échanges avec ces femmes, tu te rends compte que ce n’est pas l’emprisonnement qui a troublé leur équilibre mental. En fait, avant même d’être face au juge, elles étaient déjà malades. Imaginez une femme qui tue son mari parce qu’elle l’a trouvé en train de violer ou bien de sodomiser leur enfant. Ou encore une femme comme celle qui a brûlé 6 enfants d’une femme dans une maison. Pensez-vous qu’elle soit consciente de l’acte horrible qu’elle a posé?»,

tente de justifier Me Solange Tchamba, membre du mouvement des abolitionistes.

Selon elle,  le cas des femmes dans la situation de la condamnation à mort est plus alarmant que celui des hommes. La femme n’a pas la même capacité de supporter les couloirs de la mort dans les prisons. Elle ajoute que l’avocat qui défend les condamnés à mort a la possibilité, avec les outils de loi en sa possession d’amener le juge à atténuer la décision. Le juge aurait la capacité de pousser plus loin pour savoir si celle qui est susceptible de subir la peine de mort était responsable au moment de la commission des faits. Elle invite les juges à souvent tenir compte des circonstances qui ont entouré l’infraction.

La peine de mort est discriminatoire et va à l’encontre des droits humains d’où l’urgence de son abolition

Pour les membres de l’Association pour la Vulgarisation des Droits des Femmes et des Enfants (AVUDFE), il s’agit d’une peine discriminatoire parce que généralement ces personnes condamnées à mort sont des personnes indigentes, celles-là qui sont pauvres et ne peuvent pas trouver des avocats aguerris, elles voient leur cas gérer avec légèreté. La peine de mort est parfois utilisée comme un outil de répression politique dans certains pays, apprend-t-on.

«Le Cameroun n’est ni abolition ni exécution. Le Cameroun ne veut pas abolir, prétendant que c’est dissuasif. Or ce qui serait dissuasif c’est même l’exécution. Mais il ne veut non plus exécuter. Comment expliquez-vous que le vol de 200 mille francs conduise le justiciable à une peine de mort et quelqu’un d’autre détourne plus de 50 millions et lui ce que le code pénal dit c’est l’emprisonnement à vie?  Le vol dans l’enceinte portuaire c’est la peine de mort»,

argue Me Clémence Mafetgo, présidente de l’AVUDFE.

Les conséquences de la peine de mort sont irréversibles et dans le cadre du système camerounais il y a des risques d’erreurs judiciaires fatales pour la personne qui a été condamnée à cette peine.

Comme de tradition, le 10 octobre prochain se tiendra la 19ème journée mondiale contre la peine de mort. En prélude à cet évènement, l’Association pour la Vulgarisation des Droits des Femmes et des Enfants (AVUDFE) dont l’abolition de la peine de mort fait partie des objectifs, était face à la presse ce 5 octobre à Douala. Me Clémence Mafetgo membre de la coalition de 22 organisations camerounaises contre la peine de mort prévoit également un atelier le 7 octobre prochain à Bafoussam pour sensibiliser l’opinion publique sur l’importance de l’abolition de la peine de mort.

Rachèle KANOU

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

error: Content is protected !!
Top