RÉGION DU LITTORAL : AU MOINS 60 088 ENFANTS SCOLARISÉS SANS ACTE DE NAISSANCE

La négligence, la désunion dans les foyers et même la crise anglophone demeurent les premières causes du taux élevé d’enfants sans acte de naissance.

Selon la délégation régionale du ministère de l’éducation de base pour le littoral, les statistiques de 2019-2020 présentent 60.088 enfants scolarisés sans acte de naissance dont 33.403 enfants des populations hôtes et 26.685 enfants déplacés internes.

Le 4 octobre 2021, nous avons rencontré de nombreuses familles au tribunal de Ndokoti dans la ville de Douala. Elles étaient venues en nombre important dans le cadre des audiences pour les jugements supplétifs d’acte de naissance.

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Leur histoire pour l’établissement tardif de l’acte de naissance de leur progéniture est presque similaire. Des raisons qui vont de la négligence aux problèmes de séparation des couples passant par l’avènement de la crise anglophone qui sévit au Cameroun de plus de 4 ans.

« J’ai fait 4 enfants avec un homme qui m’a abandonnée et est allé en aventure. Jusqu’au jour d’aujourd’hui, il n’est pas revenu. Les enfants grandissent et le premier doit présenter le CEP cette année. Je ne pouvais plus dire que j’attends le jour où il reviendra au pays. Quand j’ai trouvé l’occasion de donner une identité à mes enfants je n’ai pas hésité. Avant j’avais peur de devoir dépenser beaucoup d’argent. Mais pour finir je le fais ainsi gratuitement»,

se réjouit dame wendjel. Selon cette dernière qui élève seule ses enfants depuis plusieurs années, l’absence du père  est la principale cause de l’établissement tardif de l’acte de naissance sa progéniture.

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Dans la même situation que dame Wendjel, c’est un autre homme qui a deux enfants âgées de 11 ans et 12 ans. Il vit seul avec ses deux filles depuis que la première a eu l’âge deux ans. N’étant au pays à leur naissance, la maman n’a pas pu établir leurs actes de naissance.

«J’étais à l’étranger. Quand je reviens la dame me quitte. Troublé je n’ai pu engager la procédure, mais la seule chose qui allait me contraindre à le faire c’est le CEP. Heureusement je tombe sur cette opportunité»,

argue le papa d’Idèle et Merveille.

Certains parents à la naissance de leur bébé, renvoyaient à demain et c’est ainsi que le temps s’est écoulé et la déclaration de naissance a expiré.

«Chaque fois c’était que on va faire. Et avant de nous rendre compte le délai était passé. Maintenant j’ai juste dit que j’attends le moment que l’enfant va arriver au CM2. Là je serai obligé de le faire. C’est pour cela que lorsque j’ai été informé de cet initiative à travers un frère, j’ai bondi sur l’occasion »,

soutient sieur Zebaze.

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Une campagne lancée par WOMEN’S PEACE INITIATIVES pour aider les familles…

De nombreux enfants dans la région du littoral et même au-delà obtiendront enfin leurs actes de naissance. Il s’agit d’une initiative soutenue depuis 2015 par l’Union Européenne à travers le Programme d’Appui à la Société Civile (PASC) et à présent à travers le Programme d’Appui à la Citoyenneté Active (PROCIVIS).

«Lors de nos différentes rencontres avec les femmes, plusieurs d’entre elles ont souvent posé le problème de manque d’acte de naissance de leurs enfants. C’était très pénible pour elle de voir leurs enfants scolarisés en classe de cours moyen 2 ou class 6 ne pas pouvoir présenter leurs examens de fin de cycle primaire. C’est suite à cela que nous avons eu l’idée de monter un projet pour aider ces mamans à régulariser la situation de leurs enfants sans acte de naissance »,

fait savoir Nathalie Foko coordonnatrice de Women’s peace initiatives

C’est à travers des causeries éducatives, la formation des agents relais dans le cadre de la mise en œuvre du projet en cours, qu’elle identifie les familles dans le besoin.   Les descentes sur le terrain dans les écoles, les lieux de culte, les marchés, des agences de voyage, et même le porte-à-porte dans les domiciles concourent à sensibiliser les parents.

Le projet actuel vise à délivrer des actes de naissance en faveur de 3000 enfants. Le 4 octobre 2021 au tribunal de Ndokotti, 20 familles dont 26 enfants y étaient présents dans le cadre de l’audience pour les jugements supplétifs d’acte de naissance. L’affaire a été mise en délibéré pour le 1er novembre prochain.

Notons que le phénomène des «enfants invisibles», n’est pas propre au Cameroun. Selon l’Unicef, «plus de 230 millions d’enfants de moins de 5 ans dans le monde n’ont jamais été enregistrés à leur naissance». Le droit à une identité est pourtant rappelé par l’article 7 de la Convention des Nations Unies relatives aux droits de l’enfant. La Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant contient également des dispositions similaires. Les risques auxquels sont exposés les enfants qui ne sont pas enregistrés sont énormes, et peuvent entraver leur accès à certains droits dont ceux de l’identité et de l’éducation.

Rachèle KANOU

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