Franck Tessop aurait pu être sauvé si les responsables de l’établissement intervenaient rapidement.
C’est en tout cas ce que pensent les élèves ayant vécu le drame. La proviseure et la majorité des encadreurs de ce lycée situé à Douala 3ème, étaient absents lorsque les faits se produisaient aux environs de 10h, le vendredi 12 mars. Ces déclarations sont de l’élève qui a conduit la victime dans un centre de santé, où il est mort juste quelques minutes après, pour avoir reçu un coup de ciseaux dans la poitrine.
Selon ce témoin élève en classe de Tle , au moment des faits il n’y avait pas de véhicule au lycée et les responsables présents n’ont pas réagi promptement .
«Il est allé dire au surveillant que ça n’allait pas. Lui, au lieu de le secourir, le brusque avec des questions essayant même de le chasser de son bureau, pendant ce temps le sang coulait. Lorsque l’enfant s’écroule, il lui demande de se lever, malheureusement il avait déjà perdu ses forces. C’est quand c’était déjà grave qu’il part appeler l’infirmière», relate l’élève de la classe de Tle A sous anonymat.
L’élève blessé, qui est allé lui-même signaler son malaise s’est vidé de son sang devant ce surveillant de secteur. L’infirmière de l’établissement arrivée tardivement et en manque de matériel adéquat pour la prise en charge, n’a pas pu arrêter le saignement, jusqu’à ce que Frank Tessop âgé de 14 ans perde connaissance.
«L’infirmière arrive et touche le pouce de l’enfant et déclare qu’il est déjà faible et qu’on l’amène à l’hôpital. Le temps alors de chercher la moto, la majorité des enseignants n’étaient pas là. Il n’y avait que deux censeurs, le surveillant général et le surveillant de secteur, personne n’a réagi. Tous sont restés assis, les uns sur leurs téléphones, d’autres sur leur machine. Il a fallu que ce soient les élèves de terminale C qui partent chercher la moto loin au goudron pour le transporter et aucun de nos responsables ne nous a suivis à l’hôpital. C’est un élève qui bâche l’enfant sur la moto pour l’amener à l’hôpital », laisse entendre Marker de la Terminale C.
Le lycée de pk 21 se trouve à 600 mètres de la route bitumée. Pour avoir une moto sur place il faut attendre des vingtaines de minutes.
Une mort non préméditée…
Le pire s’est produit alors que Judicaelle Tsague, la présumée coupable ne s’y attendait pas. Tout est parti d’une blague entre Franck et sa camarade de la 4ème espagnol et amie du quartier. La victime, a pris le cahier de Judicaelle pour l’embêter et s’est mis à jouer à l’extérieur de la salle de classe. Elle le lui a demandé en vain, et est sortie le récupérer.
«Franck faisait la 4ème espagnol. Il est venu la trouver dans notre classe et a commencé à jouer avec ses fournitures ce qui l’a énervée. Elle est sortie prendre son cahier mais il est revenu la taquiner de nouveau en arrachant le morceau de tissus qu’elle brodait et a fui vers le tableau. Elle étant assise au 4ème banc, a lancé les ciseaux en direction de Franck, c’est où ça l’a piqué jusqu’à il a seulement retiré les ciseaux et jeté au sol. Le sang a commencé à couler. Il est rentré dans sa classe dire à ses amis mais, ça n’allait pas toujours c’est où il va voir le surveillant de secteur», nous explique Essi, une camarade de Judicaelle.
L’élève Frank Tessop, de la classe de 4ème allemand, est mort après avoir reçu un coup de ciseaux au niveau du thorax. Judicaelle était loin d’imaginer que cela pouvait causer la mort de son camarade. Malheureusement la paire de ciseaux a transpercé les deux vêtements, un pullover tricoté et la tenue de sport que portait Franck, pour se planter dans sa poitrine.
Les ciseaux ne sont pas proscrits au lycée de PK 21
Judicaelle utilisait la paire de ciseaux pour couper et broder un tissus pour le cours d’Economie Sociale et Familiale (ESF).
Malgré la récurrence des armes blanches utilisées par les élèves contre leurs camarades dans les écoles au Cameroun, certains chefs d’établissements admettent encore certains objets dans les salles de classe. Au lycée de pk 21 par exemple, c’est le proviseur qui a distribué ce matériel aux élèves pour les cours d’ESF.
«Lorsqu’on paie la pension ici, elle inclut tout dedans. C’est elle qui a acheté et distribué les ciseaux aux élèves même les aiguilles, pourtant nos professeurs n’étaient pas d’accord parce que même leur vie est en jeu», a martelé un autre élève de la classe de terminale.
Domicile familial du défunt
La proviseure refuse de se prononcer sur le drame
Mariatou Ngachili Njoya, proviseure du Lycée de pk 21 depuis septembre 2019 dit vouloir protéger l’image de l’école et celle de ses élèves. «Ma hiérarchie ne m’a pas permise de me prononcer. C’est tragique, je ne veux pas que cela soit médiatisé. Ce sont aussi nos enfants, nous ne devons pas les exposer», nous a lancé Mariatou Ngachili Njoya.
Même auprès des parents du défunt, les circonstances du drame n’auraient pas été clarifées. «jusqu’ici nous voulons comprendre comment notre fils est décédé, mais personne pour nous expliquer. on a payé jusqu’au camera dans la pension, mais ils sont incapables de nous dire comment cela s’est fait. Mais que cette dame sache qu’il pleut sur tous les toits et la justice divine existe», lance Ines Tetsogo, la tante du défunt. Nous l’avons rencontrée, éplorée, au domicile familiale située à pk 18.
La proviseure a tenu un rassemblement ce lundi 15 mars, en présence du sous préfet de Douala 3ème. Lors de cette séance d’entretien, le chef de terre a invité les élèves à plus de responsabilité et à éviter les violences de toutes sortes.
La jeune élève âgée de 15 ans a été interpellée dans l’enceinte de l’école et séjourne depuis vendredi dernier à la police judiciaire de Bonanjo. Le corps de Franck Tessop Tetsogo est gardé à la morgue de l’hôpital de logbaba en attente des résultats de l’enquête.
Rachèle Kanou