30 femmes tuées depuis janvier 2023 au Cameroun, la sonnette d’alarme est tirée et la ministre de la promotion de la femme et de la famille invite à agir sans délai.
Visage fermée, vêtue d’une robe noire, Nadine Baana, la quarantaine sonnée est une survivante, une ex femme battue qui porte encore les séquelles des violences subies durant la dizaine d’années passées auprès de son mari, qu’elle a réussi à quitter depuis peu. Elle a échappé de justesse à un féminicide. Aujourd’hui, nous dit-elle, est un jour particulier. «Je suis très heureuse parce que le gouvernement camerounais ose enfin parler sans détour des violences faites aux femmes» nous laisse entendre cette militante des droits des femmes.
Comme près de trois cent femmes présentes dans la salle de conférence de l’hôtel la Falaise de Yaoundé ce lundi 15 mai 2023, elle est venue, à l’invitation du ministère de la promotion de la femme et de la famille, en partenariat avec ONU-FEMMES et UNFPA Cameroon, prendre part à la session de plaidoyer pour mettre fin à l’impunité des auteurs des violences basées sur le genre / conjugales et familiales.
Réflexions engagées…
Autour de la table de réflexions, le panel des intervenants composés des représentants du gouvernement, du système des nations et de la société civile est prêt à en découdre avec ces hommes aux «poings armés’’.
La première taloche est assénée par Marie Pierre Raky Chaupin, représentante de ONU-femmes au Cameroun, qui rappelle que selon une étude réalisée par l’organisme auquel elle appartient et l’office des nations unies contre la drogue réalisés en 2021, 45 000 femmes et filles ont été tuées dans le monde par leur conjoint ou des personnes issues de leur cercle familial. L’Afrique, selon le même rapport est le deuxième continent qui compte le plus de féminicides avec 17 200 cas recensés, derrière l’Asie qui en compte 17 800. Toujours selon Marie Pierre Raky Chaupin, les violences basées sur le genre sont en hausse au Cameroun et l’année 2023 est une macabre illustration de ce constat.
Le constat est approuvé par Clarence Yongo, PDG de griote qui, chiffre à l’appui viendra appuyer les dires de la représente de ONU femmes. On apprend de la journaliste que 30 femmes ont été tuées depuis le debut de l’année 2023 dont 29 cas de féminicides recensés au Cameroun en 81 jours. Des chiffres qui confiment le travail de Griote Tv sur cette problématique, car les statistiques rendues public viennent des enquêtes de terrain documentées par le Web média. D’ailleurs pour le seul mois d’avril 2023, 14 femmes sont tombées par la faute d’un homme soit du fait des meurtres conjugaux ou du fait de l’insécurité. Les chiffres et articles de Griote ont ainsi permis de tirer la sonnette d’alarme depusi quelques années sur les violences faites aux femmes.
Il n’en faut pas plus pour éperonner la colère du professeur Jean Emmanuel Pondi qui lance sous les applaudissements de la foule ‘’Il faut arrêter ces malades » avant de saluer les efforts effectués par le gouvernement pour punir les auteurs des barbaries perpétrées contre la gent féminine. Des efforts que l’universitaire juge émoussés par l’absence de communication autour des condamnations des auteurs des violences basées sur le genre «au-delà de l’exemplarité des sanctions vis-à-vis de ces pervers narcissiques, il faut communiquer. Montrer la dangerosité de ces actions déplorables par des canaux multiples y compris culturels aiderait à retenir de potentiels futurs criminels’’, recommande t-il.
Prenant la parole à son tour, la ministre de promotion de la femme et de la famille Marie Thérèse Abena Ondoa va après avoir regretté la nouvelle tendance apocalyptique des violences vis à des femmes au Cameroun , rappeler que l’épanouissement de la femme et de l’enfant dans un cadre familial sain est le combat quotidien du gouvernement camerounais qui ne ménagera aucun moyen pour mettre fin à la macabre tendance. ‘’La situation actuelle invite à agir sans délai » clame t-elle, alors qu’elle invite les acteurs de la société civile à militer avec elle et la communauté internationale pour une législation spécifique visant à punir les auteurs des violences basées sur le genre. Une loi qui selon la ministre et certains observateurs devrait palier les insuffisances juridiques actuelles qui paralysent la garantie d’un cadre familial sans danger et l’émergence d’une société qui protège les plus faibles.
« À coup sûr, si le gouvernement camerounais arrive à nous doter d’une telle loi qui se démarque par l’exemplarité des sanctions encourues pour les auteurs de violences conjugales et familiales, nous aurons dans nos villes très peu de femmes qui meurent au nom de l’amour et du foyer’’
commente Nadine Baana, activiste des droits des femmes et présidente de l’association Initiative femmes.
John Matou