Il y a 4 ans, de nombreuses personnes parmi lesquelles les femmes et les enfants périssaient dans un déraillement de train à Eseka.
Des corps avaient été extirpés du ravin, mais certaines victimes restent introuvables jusqu’à nos jours.
L’on se souvient de la femme notaire, épouse de Me Dissake disparue dans ce tragique accident. Elle n’a été retrouvée ni parmi les morts encore moins les blessés. Courroucé, l’avocat avait décidé de poursuivre la société Camrail au tribunal de grande instance de Douala.
Dans un rapport d’enquête publié par le président de la république, la société Camrail avait été déclarée principal coupable du déraillement. Dans cette note, Paul Biya instruisait l’indemnisation des victimes par la société Camrail dans de brefs délais. Toutefois, la continuité des recherches pour les personnes disparues n’avait pas été mentionnée, créant une double douleur chez les familles dont les proches n’avaient pas été retrouvés.
Des indemnisations banalisées
Des victimes ont été indemnisées, mais leurs avocats ont trouvé insignifiantes les sommes octroyées. D’après ces derniers, les indemnisations ne correspondent pas au préjudice. «Il y a eu un pan de personnes qui ont été indemnisées avant qu’on aille au tribunal. Elles ont reçu des indemnisations qui, de notre point de vue sont dérisoires parce qu’elles ne correspondent pas a un certain nombre de principes à l’échelle internationale», déplore Me Guy Olivier Moteng, avocat et membre de Universal lawyers and human rights defense, groupe d’avocats qui défendent les familles des victimes.
Il révèle qu’il n’existe pas de droit ferroviaire de la réparation au Cameroun. «Nous espérions qu’à travers ce procès là, sur la base des recherches que nous avons faites au niveau international, et sur la base des indemnisations dont ont bénéficiées les familles des disparus, pouvoir faire en sorte que le juge camerounais en tire de la graine pour pouvoir construire un droit ferroviaire de la réparation au Cameroun», poursuit-il.
Ce non respect des principes d’indemnisation, a donc poussé certaines victimes à faire opposition. Affaires qui restent pendantes. «Ce qui déçoit jusqu’à nos jours est que le tribunal n’a pas suffisamment indemnisé les victimes. Certaines victimes avaient fait appel ou opposition et jusqu’en date d’aujourd’hui, l’opposition ou l’appel n’ont pas encore été vidés», indique l’avocat.
Condamnation de Camrail
Le collectif d’avocats conduit par Me Dominique Fousse s’était chargé de défendre dix familles, certaines d’entre elles avaient rejeté la réparation du préjudice par des indemnisations et exigé que justice soit rendue. «Ces familles se sont pourvues devant la justice avec nous au tribunal d’Eseka. Et là bas nous avons obtenu quelque chose d’intéressant. La condamnation de Camrail et tous ses dirigeants de l’époque pour activité dangereuse ».
Notons que le rapport d’enquête ordonné par le président de la république mettait en cause la vitesse excessive de 96km/h au lieu de 40km/h, la défaillance du système de freinage, la surcharge des voyageurs dans le train du 21 octobre 2016 et la rallonge des rames.
Les faits
Le 21 octobre 2016, suite à la rupture d’une buse sur l’axe Douala -Yaoundé, de nombreux voyageurs s’étaient engouffrés dans le train intercity, unique moyen de transport de masse disponible ce jour-là pour rallier les deux villes. Le train 152 qui transportait environ 1 400 passagers a déraillé aux environs de 13h, près de la gare d’Eseka, faisant officiellement 79 morts et 500 blessés.
Face à l’ampleur de la catastrophe, le président camerounais avait décrété une journée de deuil national en mémoire des victimes le lundi 24 octobre 2016. Les drapeaux avaient été mis en berne dans tout le pays.
Seulement certaines promesses faites après cet accident n’ont pas été tenues. A l’exemple de la construction de la stèle en souvenir des victimes de l’accident ferroviaire. Cette œuvre est jusqu’à nos jours inachevée et abandonnée dans la broussaille. Plusieurs familles attendent une indemnisation conséquente à la situation.
Rachèle KANOU