Le voyage de l’actrice pour l’au-delà est entamé depuis hier dans la ville de Douala, l’occasion pour ses proches de distinguer sa personne de ses personnages auprès des cinéphiles.
La ville de Douala s’est mobilisée le jeudi 26 septembre 2024 à l’hôpital de la garnison militaire pour rendre un dernier hommage à Orgelle Kentsop dite Mamie Ton. Des pleurs et des grincements de dents ont été observés pour l’icône du cinéma camerounais décédée le 4 septembre dernier des suites d’un AVC hémorragique à Douala.
L’actrice de caractère irremplaçable, la Orgelle tempérée et respectueuse
Famille, collègues de l’industrie culturelle, cinéphiles et des proches expriment leur tristesse pour un monument du cinéma et une femme maternelle et impactante. Parmi les nombreux acteurs de l’industrie cinématographique présents à la mise en bière de la comédienne, figure son collaborateur de longue date, le célèbre Ebenezer Kepombia. Le producteur de la série tv « Foyer polygamique » qui a dévoilé la comédienne dans le rôle de Mami Ton, pleure une actrice irremplaçable.
« Je suis très triste parce que c’est l’une des figures du cinéma africain en général et du cinéma camerounais en particulier. Et on a perdu un gros arbre dans la forêt, donc on est altéré. On est très affecté ! Et elle qui a travaillé dans ma petite structure pendant 20 ans, elle est un grand souffle qu’on ne peut pas combler. Nous allons la pleurer toute notre vie. Elle est irremplaçable!»,
argue le comédien et producteur.
Célèbre pour ses rôles d’antagoniste dans lesquels elle incarnait des personnages avec un fort caractère, la personne de Orgelle Kentsop était de loin différente de la méchante qu’on voyait à l’écran. C’est ce que soutiennent ses collègues dont Antoinette Ngo Ndengue (Monica).
«A l’écran, c’est juste un personnage, la personnalité de la personne n’est pas pareille. C’est vrai qu’elle était très forte parce qu’elle a élevé ses enfants toute seule. Mais elle était très compréhensive et elle respectait tout le monde, même jusqu’aux petits enfants. Le secteur cinématographique perd un grand nom et un grand talent »,
atteste la collègue et amie de la regrettée. Pour Diane Mekongo qui avait partagé la scène avec elle dans « Ennemis Intimes », Orgelle Kentsop était une femme douce. « Il y avait Mami Ton, il y avait Orgelle, il faut dissocier les choses. Mamie Ton avait du caractère, Orgelle c’était quelqu’un de tempéré et douce », témoigne la comédienne. C’est dans une atmosphère festive en guise d’hommage que la dépouille d’Orgelle Kentsop a quitté la garnison militaire pour un bref passage à son domicile avant de rejoindre le parcours Vitæ de Bonamoussadi où s’est tenue la veillée artistique.
Orgelle Kentsop, la femme et mère sensibilisatrice
A son domicile au quartier New Deido, la tristesse se lit sur le visage de ceux qui entourent le domicile de la défunte. Ce sont des membres de la famille qui vivent mal son départ. «Nous digérons très mal la nouvelle, c’est vrai que ce n’est pas facile. Ce n’est même pas aisé de prendre la parole dans de telles circonstances. La douleur est très profonde », déclare dame Ortense Makamteu, sœur aînée de Orgelle Kentsop. Dame Makamteu retient également de sa cadette qu’il faut garder espoir quand on est en vie. « Le souvenir que je garde d’elle c’est qu’elle me disait toujours mama sita, il n’est jamais trop tard », révèle la sœur aînée. Au quartier New Deido encore, le caractère maternel de la défunte actrice marque les esprits, un jeune pleure une femme qui prenait soin de lui et des autres jeunes du quartier.
«Je pleure Mami Ton, je pleure vraiment. C’est une mère qui nous a soutenus ici au quartier. C’est une mère qui nous a beaucoup conseillé de nous battre, de travailler dur. Aujourd’hui elle part, elle nous laisse. Ça me fait mal, mais soyons forts »,
déclare tristement Juscar Wabo, 24 ans. Une autre jeune résidente au quartier New Deido regrette également le départ de la maman sensibilisatrice.
« C’était une maman qui savait rassembler, qui était très aimable. Elle nous apprenait ce que c’est que le savoir vivre. Elle nous disait toujours que dans la vie, il faut travailler et il ne faut pas toujours regarder ce qu’autrui a parce qu’on ne connait pas l’origine de ses fonds. Donc il faut vraiment chercher nos propres ressources et ne surtout pas envier les autres »,
rapporte Rose Alvine.
Au-delà de ses enfants biologiques fortement dévastés, Orgelle Kentsop laisse ainsi plusieurs autres enfants attristés, à qui elle a inculqué des valeurs de paix et d’harmonie dans la société. Le Cameroun perd ainsi en plus d’une icône du cinéma, une femme d’influence.
Le double médaillé d’honneur par le ministère des arts et de la culture, et double lauréate du canal d’or de la meilleure comédienne de série tv sera inhumée demain samedi 28 septembre à Fokoue, dans la région de l’Ouest après un passage de sa dépouille à Loum, dans le département du Moungo, région du Littoral.
Chanelle NDENGBE