L’artiste Lady Ponce est au cœur de la polémique depuis quelques jours au sujet d’un vêtement de scène qui laisse transparaitre son corps, arguant en avoir le droit. Que dit la loi à ce sujet ?
A la question de savoir si la loi camerounaise autorise la nudité dans la rue ou sur scène, tous les juristes que nous avons consultés ont eu la même réponse : NON ! Cependant, ils ont mentionné une exception dans le cadre artistique des spectacles.
La nudité sur scène, une exception de la loi ?
Des photos de l’artiste Lady Ponce sont apparues sur le réseau social Facebook où la chanteuse du Bikutsi en prestation, arborait une robe qui laissait transparaitre ses parties intimes notamment sa poitrine nue. Tandis que ces photos ont laissé certains de marbre, d’autres ont manifesté leur indignation. Certains s’interrogent sur la liberté qu’elle a à se vêtir de sorte en public.
Sur cette question, plusieurs juristes s’accordent à dire que la loi ne clarifie pas ce sujet. Ils reconnaissent tout de même que l’effet produit par l’accoutrement d’un artiste sur scène peut avoir une connotation artistique ou culturelle que la loi peut reconnaitre comme alibi.
«La prestation des artistes fait partie des prestations liées au spectacle et même si l’esprit de la loi dans l’outrage à la pudeur consiste à choquer le public, il peut y avoir des circonstances atténuantes et là ça dépendra de l’appréciation du juge »,
explique Alain Rodrigue Nkonga, l’un de nos consultants.
Cette appréciation du juge est fondée sur la suggestion de l’artiste, suggestion qui est connotée autant dans sa prestation que sur la tenue qu’il ou qu’elle aborde. A ce sujet, un autre juriste donne cette autre explication : «La nudité dans l’art est toujours un sujet délicat à manipuler. Ici il y a plus de suggestion que d’exposition du nu».
Aussi, la loi pouvait prévoir cette particularité au regard des précisions sur l’outrage public à la pudeur, mentionnées à l’article 263 du code pénal : « tel acte constitue un outrage à la pudeur publique dans tel endroit ou dans telle circonstance alors qu’il n’en constitue pas un dans un autre endroit ». Cet autre endroit serait la scène de prestation de l’artiste.
Exposition de la nudité, atteinte à la pudeur, que dit la loi ?
La loi camerounaise recadre un nombre de délits sous le parapluie des « Atteintes à la moralité publique ». Le premier et celui qui fait ici l’objet de notre attention est « l’outrage public à la pudeur ». C’est un délit selon l’Article 263 du code pénal qui énonce :
«Est puni d’un emprisonnement de quinze (15) jours à deux (02) ans et d’une amende de dix mille (10.000) à cent mille (100.000) francs ou de l’une de ces deux peines seulement, celui qui outrage publiquement la pudeur ».
Le même article décrit le délit de la sorte : « l’outrage public à la pudeur consiste dans le fait de commettre publiquement un acte contraire aux bonnes meurs ». L’article précise encore que « ça peut être un acte, une attitude, un geste de manière à offenser la pudeur » et qu’il doit avoir lieu en public. L’exposition de la nudité à travers même le port des vêtements dit légers en public peut alors faire l’objet de poursuites judiciaires pour «outrage public à la pudeur ».
Au regard de ces explications et la loi ne se prononçant pas formellement sur la pudeur des artistes sur scène, on peut conclure qu’il faut laisser cours à la suggestion de l’habillement de l’artiste qui monte sur scène aussi obscène soit-il avant de l’attaquer en justice. Le monde artistique est inondé de concepts, de messages que les artistes dans les méthodes (l’accoutrement y compris) qui leur siéent, peuvent véhiculer. Le débat pourrait se situer au niveau de ces messages véhiculés et sur l’impact qu’ils peuvent avoir sur le public qui les reçoit.
(c): Emmanuel Sime
Chanelle NDENGBE
