C’est une décision du ministre de la santé publique qui vient sonner le glas du débat autour de l’usage de ces produits pour blanchiment volontaire de la peau.
Des produits principalement utilisés hors de leur cadre thérapeuthique pour inhiber la mélanine protectrice que l’on retrouve chez les peaux noires et foncées.
Ce 19 Août 2022, Manaouda Malachie a signé une note «portant interdiction d’importation, de fabrication et de distribution de certaines substances entrant dans la composition des produits cosmétiques».
Il s’agit de «l’hydroquinone et ses dérivés, le mercure et ses dérivés, les corticoïdes… également soumis au même régime de l’interdit les mélanges avec des produits énumérés … dans les produits cosmétiques». La distribution des produits d’hygiène corporelle contenant ces substances est également interdite.
L’issue d’une bataille de longue haleine autour de la dépigmentation volontaire de la peau, sujet tabou avec ses nombreuses conséquences sur le plan sanitaire.
Les pharmacies n’échappent pas à ce vent d’assainissement. Le délégué régional de la santé publique pour le littoral invitait le 17 août les responsables des pharmacies d’officines à présenter les documents et agréments leur donnant droit à la création et à l’exercice d’activités dans ce secteur déliquat.
Dans le même élan, les chefs de district de santé sont appelés à faire des descentes sur le terrain, dans l’optique de fermer toute officine qui vendrait de façon illicite «des médicaments, compléments alimentaires et boissons diététiques tels : Gluta Pur, Mukala (Glutathionne, collagène, vitamine C), gélules super éclaircissantes et anti cholestérol, Beta carotène 25 000 UI, boissons minceurs «dites adieu aux kilos».
42% de camerounaises se blanchissent la peau
Une question de santé publique qui inquiète. Depuis quelques semaines le ministère Camerounais de la santé publique mène une lutte acharnée contre les promoteurs des produits dépigmentants. Un combat qui mérite une attention, lorsqu’on s’attarde sur les chiffres alarmants que présente le Cameroun.
Selon l’association nationale de dermatologie, 42% de femmes camerounaises se blanchissent la peau et parmi elles 25% sont des jeunes étudiantes.
Pour la Société Camerounaise de Dermatologie (Socaderm), Douala est considérée comme la principale ville où la dépigmentation de la peau est accrue. D’après une dernière étude 27,8% des habitants de la métropole économique font recours à des produits décapants. Une étude réalisée sur un échantillonnage de 10 000 hommes et femmes âgés entre 15 ans et 50 ans.
La ville de Kumba dans le Sud-ouest du Cameroun vient en deuxième position dans l’étude. 24,1% de la population se blanchit la peau.
Yaoundé, la capitale politique du Cameroun est classée en troisième position dans cette étude avec 19,6% de la population adeptes des produits éclaircissants. Elle est suivie par la ville de Kribi dans le Sud avec 11,1% et Bangangté à l’Ouest Cameroun 10,3%.
«Les chiffres sont alarmants. Les femmes déjà dépigmentées sont atteintes de cancer, d’hypertension artérielle, de cancer de la peau, du sang, du col de l’utérus. Il est même difficile pour certaines de faire des enfants»,
déclarait la défunte Flora ZE promotrice du mouvement Black Attitude.
Depuis plusieurs années, le blanchiment de la peau est dénoncé par les journalistes et la société civile, les produits utilisés pour le faire étant des plus nocifs. D’ailleurs il y a quelques temps la députée Nourane Fosting a mis sur le marché des boissons éclaircissantes à base de Glutathion, d’Alfa Arbutine, des substances toxiques pour la santé. Elle a été sommée de stopper cette activité dangereuse ainsi que d’autres promotrices comme Carimo, Mira cosmetique, Ivalux Impérial appelées à retirer les produits blanchissants de leurs rayons.
Rachèle KANOU/ Chantal Mveng