La covid-19 a certainement remporté tous les trophées de l’année, mais elle n’a pas été la seule porte étroite de 2020.
Les violences faites aux femmes
Plusieurs actualités ont lamentablement mis en scène les violences faites aux femmes. L’une d’elle a particulièrement défrayé la chronique, nous l’avons suivie de bout en bout, même si la spirale du silence semble ne pas éclairer son dénouement.
Il s’agit de l’affaire Lydienne Solange Taba, jeune étudiante de 23 ans, décédée le 25 juillet 2020 dans le domicile de Franck Derlin Eyono Ebanga, Sous-préfet de la Lekoundje au moment du forfait. Lydienne avait été tuée volontairement ou accidentellement avec l’arme de l’administrateur civil alors qu’elle était enceinte de deux mois. La jeune femme avait raconté à ses amis avoir une situation tendue avec son compagnon, qu’elle présentait auparavant comme son prince charmant. Malheureusement, cette idylle ne va pas la mener au mariage qu’elle pensait célébrer avec sa famille. Elle a réussi son BTS à titre posthume. L’ouverture du procès de son présumé meurtrier reste attendue. Une affaire dont l’intrigue garde tous ses secrets.
S’agissant toujours des violences basées sur le genre nous avons le souvenir aussi funeste que réel de Célestine Ngah Akoa, étudiante de 19 ans, froidement assassinée derrière l’amphi 700 de l’université de Yaoundé 2 à Soa. C’était un soir de juillet 2020, Célestine était sortie de sa chambre pour acheter quelque chose à manger. Ayant déjà subi une agression dans ce couloir de la mort, elle voulut le traverser avant la nuit profonde. Malheureusement, cette décision lui aura été fatale. Elle succombera à ses blessures au bout de deux heures d’attente, au sein de l’infirmerie du campus. L’infirmier de garde absent lorsque la blessée est arrivée sur son lieu de service, ne va se pointer qu’au bout de cent vingt longues minutes.
Ce triste récit de vie va convoquer une enquête de Griote et les révélations seront plus que troublantes. Les étudiantes sont fréquemment victimes d’agression derrière le fameux amphi 700, espace lugubre rebaptisé «La porte des étoiles». Dans les mini-cités à Soa, les étudiantes ont plusieurs fois été victimes de viol, elles l’ont signalé mais rien n’a été fait. Célestine Ngah Akoa a été inhumée sans qu’aucune voix ne s’élève pour annoncer des mesures fortes, visant à lutter contre l’insécurité dans la cité universitaire de Soa.
La pédocriminalité prend de l’ampleur …
Encore dans le registre des violences, cette fois celles commises sur les enfants, nous avons assisté cette année à la multiplication des cas de viol et de maltraitance d’enfants. Des mineurs victimes de pédocriminalité dont le bourreau s’en sort parfois libre du fait de son statut ou de la corruption. Ces cas, ont été dénombrés autant au Cameroun, en Côte d’Ivoire, qu’au Nigeria. Le Nigeria dont l’Etat de Kaduna a adopté une loi permettant la stérilisation chirurgicale des coupables de viol. Une décision saluée par les défenseurs des droits des enfants et des femmes, mais dont l’application reste attendue.
Les femmes et les enfants paient le prix fort de la crise anglophone
Les débats au sujet de la crise anglophone se sont accentués avec l’accroissement des assassinats des femmes et la tuerie des enfants. Celle la plus retentissante ayant été commise au mois d’octobre à la Mother Francisca Bilingual academy à Kumba. Des hommes armés avaient fait irruption dans ce complexe scolaire, ils ont ouvert le feu, faisant 6 morts et 13 blessés, les principales victimes étant des filles.
Avant Kumba dans le Sud-Ouest, il y a eu Ngarbuh dans le Nord-Ouest. Dans cette autre tuerie, 14 femmes et enfants avaient succombé aux attaques, c’était le 14 février 2020. Face à la crise anglophone, même le hashtag #EndAnglophoneCrisis n’a pas pu attenuer les tensions.
Le coronavirus a marqué de sa présence
Sur le plan de la santé, le coronavirus a imposé sa conjoncture, il a davantage appauvri les femmes, exacerbé les violences conjugales et provoqué les mariages forcés. Situation qui a accentué l’écart homme-femme.
Dans la sphère de décision …
Il faut dire que la conquête féminine du pouvoir ne sera pas un long fleuve tranquille. Quatre dames ont été candidates à l’élection présidentielle en 2020 en Afrique centrale et de l’Ouest, mais, elles ont été loin des favoris. Il s’agit des Dr Makalé Camara et Dr Makalé Traoré de la Guinée Conakry, Yeli Monique Kam du Burkina Faso, et Catherine Samba Panza de la République Centrafricaine.
En dépit de cet océan de nouvelles peu favorables, il y a tout de même une corne d’abondance. L’autrice Djaili Amadou Amal nous a montré à travers sa passion pour la littérature que les femmes sont des conquérantes. Elles s’investissent à occuper la sphère de décision. Une épreuve qui va prendre du temps mais qui est porteuse de fruits. Les plus jeunes dirigeantes à la tête des institutions s’étant illustrées de fort belle manière. Nous citerons Emma Théophilus, namibienne, la plus jeune ministre de la planète à 23 ans et Sanna Marin, la plus jeune cheffe du gouvernement à 34 ans en Finlande.
Il reste tout de même vrai que l’analyse des chiffres expose les disparités entre les hommes et les femmes. Pour le secteur de la santé par exemple, les femmes occupent juste 30% des postes de prise de décision, 13,4% de jeunes femmes sont susceptibles d’être sans emploi dans de larges parties du monde, contre 12, 1% pour les hommes et deux tiers des personnes analphabètes dans le monde sont des femmes, selon les chiffres d’ONU-Femmes.
Des gaps qu’il faut combler en célébrant les réussites féminines et en informant sur les opportunités, les injustices, les inégalités.
C’est à cela que nous nous attelons en 2021.
Bonne et heureuse année à tous.
Clarence YONGO/ CEO Griote